Depuis le 1er septembre 1986, la voûte céleste s’est enrichie d’un astéroïde baptisé
« (4482) Frèrebasile »
➀,
au standard de l’Union astronomique internationale.
C’est ainsi que son découvreur, l’astronome Alain Maury,
honore son ancien professeur, le Frère Basile (Nicolas Dupont, en religion : Arbaud-Basile, 1905-1999), enseignant
en mathématiques au lycée Saint-Joseph de Nancy-Laxou durant 55 ans (1939-1994).
Le Frère Basile enseigne en classes de première et terminale, à une époque où les programmes prévoient des leçons de cosmographie. Curieuse appellation quand on parle davantage d’astronomie ou d’astrophysique de nos jours.
L’idée d’enseigner la science des astres dans le secondaire nait des "Lumières" et se structure après la Révolution, en contre point des humanités classiques de l’Ancien Régime.
Les musées scolaires qui fleurissent durant la deuxième moitié du XIXe siècle, gardent trace de cet apprentissage avec leurs imposantes lunettes astronomiques (Molteni, Radiguet et Massiot, Mabille, etc.) qui nous sont parvenues, ainsi que les ouvrages de leurs bibliothèques à cet âge d’or de la vulgarisation scientifique (Guillemin 1864, Flammarion 1880, etc.) où « la grande affaire » est de réaliser des cartes du ciel.
Si le terme d’astronomie s’enrichit peu à peu des progrès scientifiques (optique, physique, chimie), c’est le terme de cosmographie que les programmes scolaires retiendront à partir de 1830 : une branche des mathématiques qui décrit pour l’essentiel le mouvement des astres. Une approche géométrique du ciel qui caractérise une spécificité française.
Voilà ce que proposent les exercices d’un manuel scolaire de cosmographie de 1927 ➁. Une discipline à la triste réputation, souvent aride, repoussée en fin d’année, tombant rarement aux examens… et finalement emportée par la réforme dite des « mathématiques modernes » au tournant des années 1970 ➂.
Comment donner vie à ce cours ? L’idée de s’équiper d’un télescope pour initier les élèves semble émerger fin 1948 : une conférence organisée par la S.A.F. ➃ du groupe Lorraine prouve qu’on peut construire son télescope soi-même.
Frère Basile se met à la manœuvre avec le Frère Joseph Emmerich (1897-1979) pour fabriquer le miroir, la monture, tester et installer ce qui constitue le télescope « Frère Léonce-Guellin » ➄, une centaine de kg, sur le toit de l’école durant l’été 1951.
Entre 200 et 300 heures de travail seront nécessaires entre autre pour « tailler » par friction la courbure désirée des disques bruts de verre spécial fournis par la compagnie Saint-Gobain : s’enchaînent taille, doucissage, polissage sans cesse vérifiés par des contrôles physiques (gabarit de 10 cm pour 3 m de rayon) et optiques ➅.
C’est cet outil qui va permettre de développer des procédures d’observations que le Frère Basile va élaborer pour encadrer les activités des jeunes, comme ce « travail d’astronomie » qu’il propose au printemps 1965 :
C’est là que se cristallise « l’aventure éducative » autour du Frère Basile et de la passion des cieux étoilés.
Les activités pédagogiques d’un club d’astronomie se développent, limitées aux élèves de Saint-Joseph (Cercle amical des Jeunes astronomes). Ce club réalise des travaux d’astronomie variés :
Ces travaux donnent lieu à des rapports écrits et oraux produits par les élèves, dont certains seront récompensés par des Prix (Camille Flammarion en 1963 et en 1964, par exemple).
Le déménagement du pensionnat dans de nouveaux locaux à Laxou en septembre 1964 permet l’installation d’un observatoire plus complet avec une coupole orientable de 4 m de diamètre qui va donner officiellement au quartier le nom de « zone de l’observatoire »… Désormais le télescope « fait-maison » est associé à une lunette d’observation offerte par un industriel lorrain, Michel Paul-Cavallier.
Les deux outils aux caractéristiques complémentaires (luminosité, grossissement) vont s’enrichir d’équipements photo améliorés et d’un spectrographe (composition chimique des étoiles). L’observatoire bénéficie d’un bureau-bibliothèque et d’un labo-photo. L’ensemble est inauguré le 24 avril 1966 après de longs travaux.
C’est en 1965 qu’il crée le « Cercle Orion » qui élargit ses activités d’animation aux jeunes du secondaire de la région de Nancy, avec son périodique l’écho d’Orion, toujours édité, et dont le premier numéro date de mars 1965. C’est cette même année qu’il fonde la Société Lorraine d’Astronomie (S.L.A.) ➆ avec ses plus fidèles amis. Cette société « scientifique » rassemble ses adhérents pour des observations, des conférences, des visites et des stages, recrute avec succès au gré des éclipses et autre nuit des étoiles, fait naître des vocations.
Frère Basile se retire des activités de la société en 1994 et décède en 1999. Cette même année le S.L.A. quitte les locaux de Saint-Joseph (qui fermera l’été 2009) pour s’installer à l’université Henri-Poincaré en 2001 où se trouve son siège actuel.
À travers son aventure, on fera mémoire de celles d’autres Frères « astronomes » ou « cosmographes » :
Documents à consulter :
Bruno Mellet
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