L’Institut des Frères des Écoles chrétiennes revient en France après la période révolutionnaire, en 1804. Il installe sa Maison-Mère à Lyon (au "Petit-Collège", l’actuelle mairie annexe du 5e arrondissement) grâce à l’appui du Cardinal Fesch.
En 1821, suite aux démarches de M. Dubois (1752-1833), ancien Frère Boniface, le gouvernement général de l’Institut déménage et s’installe à Paris, 165 faubourg Saint-Martin, dans la Maison du Saint-Enfant-Jésus : il va y demeurer 26 ans. Il devra de nouveau déménager quand cette propriété sera expropriée pour la construction de la future Gare de l’Est.
La nouvelle implantation, en 1847, est une propriété de la rue Plumet (renommée rue Oudinot).
Dès leur rétablissement en France, en 1804, les Frères jouissent d’une protection pour le bien qu’ils apportent en relançant l’enseignement qui avait disparu pendant la Révolution. En 1818, les curés et maires de Paris demandent au Supérieur général que les Frères, et notamment le Régime ➀ , viennent s’implanter à Paris. Après d’âpres négociations, cela est rendu possible par décision du Conseil général du département de La Seine, le 27 avril 1819.
Voici quelles en sont les modalités :
« [Le Conseil] Déclare être d’avis :
Le 30 mai 1821, l’ordonnance du roi n° 2341 donne au Préfet de la Seine l’autorisation d’acquérir, au nom de la Ville de Paris, la maison du Faubourg Saint-Martin avec ses dépendances.
Après l’expropriation de 1846 de la maison du faubourg Saint-Martin, le conseil municipal décide, en février 1847, le transfert de la maison des Frères. Il charge le Préfet de la Seine d’acquérir, pour la Ville de Paris, l’hôtel de la rue Plumet et ses dépendances. L’ordonnance royale du 17 avril autorise le nouvel achat ; les clauses de 1819 demeurent intactes.
La propriété de la rue Plumet (devenue rue Oudinot en mai 1851) possédait un hôtel, construit vers 1775 par Gaillard de Beaumanoir, situé alors en pleine campagne. En 1784, le comte de Montmorin, alors ministre des Affaires extérieures, achète la bâtisse et l’agrandit. Après la période révolutionnaire, l’hôtel devient propriété du général comte Jean Rapp, passe ensuite aux mains du duc d’Aumont et du marquis de la Roche-Dragon. C’est de ce dernier que la Ville de Paris en fait l’acquisition en 1847.
Il fallut aux Frères aménager les bâtiments qui n’étaient pas adaptés pour une congrégation religieuse. Des maisons à proximité de l’hôtel sont utilisées pour le Noviciat, la chapelle et l’infirmerie pour les Frères âgés.
Puis ce fut la période des constructions : la ville de Paris construit
L’Institut participe aussi à ces dépenses. La guerre de 1870 stoppe les autres constructions envisagées. Il reste tout de même un grand jardin où les Frères font installer des statues (la sainte Vierge en 1855 et le Fondateur des Frères, Jean-Baptiste de La Salle en 1875) et une grotte de Notre-Dame de Lourdes (1877).
La chapelle est transformée, selon les plans en partie réalisés par le Frère Pierre-Célestin, vers 1879-1881, et des Frères, sous la direction du Frère Samuel de Béziers, en font la décoration intérieure.
La Maison-Mère reçoit, entre 1853 et 1884, les Chapitres généraux pour discuter des questions organisationnelles de l’Institut et procéder à l’élection des Supérieurs généraux et leurs Assistants.
Les locaux abritent le gouvernement général de l’Institut et les services administratifs tels que le Secrétariat général et la Procure générale, des maisons de formation… l’infirmerie qui vit passer plus de 6 000 malades.
Tout se traite rue Oudinot : relations avec les communautés et les administrations publiques, gestion des assurances, de l’immobilier, des contentieux, publication des ouvrages de communautés et des écoles, confection de soutanes des Frères et commande d’objets cultuels.
Des centaines de personnes habitaient dans ces lieux (346 Frères et novices en 1873 ; 534 en 1890 et seulement 115 en 1904).
Dès 1879, le Conseil municipal de la ville de Paris évoque la question de l’Institut. Les lois Ferry et Goblet qui mettent en place l’enseignement laïc, retirent aux Frères leur rôle d’instituteurs publics : leur maintien dans les locaux de la rue Oudinot n’aurait plus raison d’être.
Le Supérieur général, Frère Irlide, rédige deux mémoires (en 1881 et 1882) présentant l’argumentation suivante : la concession des bâtiments aux Frères n’exige pas qu'ils dirigent les écoles communales mais elle est indispensable pour la maison de formation des Frères. Or le noviciat existe encore.
Le procès s'ouvre en 1879 et va durer un quart de siècle devant plusieurs juridictions : tribunal civil de la Seine, Conseil d’État, tribunal des conflits. La Ville de Paris est déboutée en première instance en 1896. Des nouveaux recours ont lieu jusqu’à ce que l’affaire soit portée en 1905 devant les magistrats de Rouen.
La situation se présente dès lors différemment : depuis la loi du 7 juillet 1904, la Congrégation des Frères des Écoles chrétiennes n’est plus reconnue et n'existe plus légalement en France..Elle doit abandonner les bâtiments dans un délai de quatre mois comme l’exige l’arrêt rendu par la Cour de cassation, le 22 juin 1905.
Les Frères n’ont pas attendu cet arrêt pour déplacer la Maison-Mère. Dès 1904, ils ont installé à Lembecq-lez-Hal, en Belgique, le nouveau siège du gouvernement de la Congrégation.
Lors de la décision du tribunal, la Ville de Paris n’est plus propriétaire des lieux. Elle les a échangés avec un bien appartenant à l’État, la caserne d’Eau, dite du Château d’Eau. Des travaux d’aménagement commencent, rue Oudinot, pour abriter le ministère des Colonies (aujourd’hui ministère des Outre-Mer) qui occupait jusque-là le Pavillon de Flore (une aile du Palais du Louvre). La chapelle est également détruite pour permettre une meilleure circulation et relier des bâtiments entre eux.
Les bureaux du Ministère s’ouvrent rue Oudinot au début de 1910.
Magali Devif
Documents du mois déjà publiésQuelques documents sur la Maison-Mère, de la rue Oudinot (cliquez pour agrandir)